La participation est un outil de coproduction du service public qui prend plusieurs formes. Celle citoyenne, plus large, « favorise une expression individuelle et collective, informée et argumentée, avec pour finalité de nourrir la décision publique » (convention, jury citoyens, consultations). Celle des usagers (consultation sur les horaires d’une crèche, sur l’aménagement d’une rue, la participation des usagers dans le domaine de la santé, etc.) implique spécifiquement les utilisateurs d’un bien public ou les bénéficiaires d’un service public donné.
La participation des usagers permet des améliorations continues des pratiques existantes par des services plus adaptés aux besoins. Elle ne génère pas d’innovation radicale qui induirait des ruptures avec le fonctionnement habitue selon Donald A. Norman et Roberto Verganti. Une telle métamorphose repose notamment sur une évolution des postures et des interactions entre les usagers, les agents et les élus.
Des mutations réelles
La participation des usagers repose sur un ensemble d’outils et de postures (transversalité, coopération, écoute des usagers, etc.) éloignées des procédures et des référentiels (gestionnaires, décisionnels et managériaux) habituels des agents, tels que le respect de la hiérarchie, le devoir de réserve, etc.
De nouvelles terminologies se développent pour traduire l’implication des agents dans la participation. C’est l’agent participatif, de Guillaume Gourgue, qui se forme et pratique les outils de l’intelligence collective pour la coproduction, qui organise des processus de participation. C’est le transformateur public à Marseille, « personne chargée d’une mission de service public, fière d’accomplir efficacement sa mission d’intérêt général, en développant ses capacités de créativité, de coopération et d’initiative ». C’est l’usagent, lorsque l’agent est lui-même associé à l’amélioration de ses conditions de travail comme la consultation Fonction Publique +.
D’autres modalités, parient sur la participation conjuguée des usagers et des agents dans des processus de co-construction de services ou de politiques publiques : le programme Service Public+ de la Direction Interministérielle de la Transformation Publique, la Transfo de la 27ème Région pour préfigurer ensemble la fonction innovation d’une administration, encore le programme Carte blanche dans le département du Lot pour construire un service public adapté aux besoin des usagers et du territoire.
Sur le terrain, deux administrations coexistent
Les agents témoignent de la persistance du modèle d’administration cloisonnée rendue de manière descendante « pour » les usagers, plus que par les usagers. Au quotidien l’approche par les usages se superpose au fonctionnement classique de l’administration.
« L’intelligence collective est l’avenir du service public » explique Stéphanie Portier dans un entretien pour le Cercle des Acteurs territoriaux.
Tous ces modalités de participation changent profondément les relations entre les agents et les usagers. Elles évoluent de la défiance à la confiance et renversent le rapport de domination pour plus de coopération. Les agents expérimentent le décloisonnement interne et vont vers les usagers pour prendre en compte leur besoin et coproduire avec eux.
À condition que les élus s’impliquent
Pour que ces interactions s’inscrivent dans le quotidien de l’organisation, le portage et la place des élus doit s’affirmer et ainsi permettre que la participation des usagers ne reste pas une simple variable d’ajustement mais soit bien un vecteur d’effectivité et de résilience du service public.
Séverine Bellina, Réseau Service Public