La Fonction publique n’est pas épargnée, avec 32 % des agents qui disent en avoir été victimes. Dans la territoriale, ce chiffre monte même à 40 %, tandis qu’il est de 35 % dans les entreprises publiques, de 28 % dans la Fonction publique d’État, et de 27 % dans la Fonction publique hospitalière.
Un baromètre de Qualisocial et Ipsos, publié en septembre 2022, explique ces chiffres élevés par plusieurs facteurs. En amont, 44% des salariés déclarent ne pas être bien informés sur le harcèlement au travail, pointant un véritable manque de sensibilisation. Mais elle révèle aussi que sept entreprises sur huit n’ont tout simplement pas mis en œuvre les mesures obligatoires !
Harcèlement : de quoi parle-t-on ?
Si toute violence au travail est inacceptable, toute violence n’est pas du harcèlement ! Dans le code pénal (article L 222-33), il est défini comme « des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ». Trois critères sont donc à retenir : la répétition des actes, le fait que ces actes dégradent objectivement les conditions de travail, et le constat d’impacts sur la carrière et le bien-être – physique, mental – de l’agent.
Dans les faits, ses formes multiples et parfois insidieuses peuvent le rendre difficile à repérer : insultes, réflexions déplacées, menaces… Il peut être individuel (une personne harcèle une autre personne), institutionnel (le harcèlement comme stratégie de gestion d’équipe ou de management), horizontal (une personne de l’équipe est harcelée par ses collègues). C’est pourquoi la répétition et le constat de conséquences sur la santé mentale ou physique de l’agent sont deux éléments essentiels pour le caractériser.
Il peut conduire son auteur à des sanctions disciplinaires en interne… Mais c’est aussi un délit, puni de 2 ans de prison et de 30 000 euros d’amende – sans compter les potentiels dommages et intérêts à verser à la victime. En cas de harcèlement sexuel, ces sanctions peuvent aller plus loin – notamment si l’auteur a une position hiérarchique supérieure, ou si le harcèlement est collectif.
Fonction publique : Quelles mesures prendre contre le harcèlement au travail ?
Depuis le 1er mai 2020, en application la loi de transformation de la Fonction publique du 6 août 2019, la mise en place de dispositifs de signalement de violence, de discrimination, de harcèlement et d’agissements sexistes dans la fonction publique est obligatoire. Ce dispositif doit recueillir la parole des agents victimes ou témoins de manière confidentielle, les orienter vers les professionnels compétents pour l’accompagner (médecins, psychologues, défenseur des droits…), mais aussi vers les autorités compétentes pour sanctionner le ou les auteurs (notamment en réalisant une enquête administrative). Mais en dépit de l’obligation, il reste du chemin à parcourir : en 2022, une enquête de Départements de France, FNCDG, France urbaine et Intercommunalités de France révélait que seules 34.90 % des collectivités avaient un dispositif de signalement !
L’autre volet à développer est la prévention. D’abord en s’assurant que tout agent a connaissance du dispositif de signalement… Mais plus largement, la prévention du harcèlement entre dans le cadre de la prévention des risques professionnels, et nécessite d’agir sur les conditions de travail, l’organisation du travail, les relations de travail, le management, etc. Le web regorge d’outils, fiches, guides pour construire pas à pas une démarche de lutte contre le harcèlement : il n’y a plus qu’à s’en saisir !
Julie Desbiolles (Réseau Service public)
En savoir plus : guides et outils
- Guide de prévention et d’accompagnement des situations de violences internes, par le CDG68, contenant notamment un chapitre sur la prévention et une série d’outils.
- Guide édité par le SNDGCT sur le harcèlement moral et sexuel dans la Fonction publique : très complet et très clair, il présente le cadre juridique, les sanctions applicables et les outils.
- Exemples de dispositifs de signalement détaillés : celui de l’INSERM, celui du CDG60, celui du CDG56
- Guide de la DGAFP sur la lutte contre les violences sexistes et sexuelles dans la fonction publique.
- Modèle de lettre à télécharger pour signaler des faits de harcèlement.